jeudi 6 septembre 2007

1 - LA NAISSANCE DU PROJET

En février 2007, un groupe de jeunes reillannais (04) est parti à Tambacounda (Sénégal), pour participer à la construction d’une classe et d’un bloc sanitaire. Genèse d'un projet :

En 1999, le voyage de Reillannais au Sénégal a fait naître la volonté de créer des échanges entre l’école Georges Aillaud de Reillanne (04) et l’école Adja Aïda MBaye de Tambacounda, dans le but de sensibiliser les jeunes enfants à d’autres cultures, ainsi qu’à la notion de partages et d’échanges.

En 2002, l’école de Reillanne reçoit deux enseignants sénégalais de l’école Adja Aïda MBaye, dont le directeur de l’école maternelle ; à Tambacounda, une grande fresque est peinte sur le mur de l’école, représentant le logo de l’association, symbole de nos échanges.
Sachant que l’école maternelle de Tambacounda manquait de mobiliers, Reillanne récolte des fonds en organisant des soirées à thème et fait faire une trentaine de chaises et de tables par un ébéniste local. Le mobilier sera remis à l'occasion de la venue de Didier et de sa famille.
Le manque d’eau nécessite la création d’un puits : 70 000 CFA sont remis à l’école pour permettre le busage du puits que les Sénégalais avaient préalablement creusé.
En 2005, il est proposé de restaurer une ancienne salle de classe pour accueillir une bibliothèque. Pour financer ce projet, l’école de Reillanne réalise un CD de chansons dirigée par une enseignante, Isabelle Roux, et dont les textes sont créés par les élèves eux-mêmes.

Les arrangements musicaux et l’enregistrement sont réalisés avec l’aide de nombreux parents d’élèves qui se rendent disponibles pour l'occasion, dont Helmut Nunning, contrebassiste, qui réalisera aussi les enregistrements. Trois chants sénégalais enregistrés à l’école de Tambacounda sont inclus dans le disque. Il est présenté lors d’une soirée de chants et vendu en soutien au projet de bibliothèque.
En 2006, l’idée d’organiser un voyage de jeunes reillannais pour participer à la construction de la bibliothèque est évoquée et accueillie avec enthousiasme dans les deux pays. Spontanément, un groupe de jeunes reillannais et des villages voisins se présentera candidat pour l'aventure.
Pendant ce temps, au Sénégal, les évènements politiques entraînent le déblocage de fonds destinés aux écoles : dans ce contexte, la salle devant accueillir la bibliothèque fait l'objet de travaux de restauration et des élèves y sont installés provisoirement.
L’intervention des jeunes sera donc réorientée vers une autre demande émanant du directeur de l’école maternelle, président de l’association sénégalaise, Tidiane Baldé :
« Depuis le début de son partenariat avec le nord, l'école maternelle municipale de Tamba ne cesse de voir son effectif s'agrandir. Les locaux et les sanitaires deviennent insuffisants et nécessitent une extension. C'est pour cela que nous demandons à nos amis de bien vouloir nous aider à la construction d'un abri provisoire pour loger les 25 enfants de 3 ans qui sont recrutés et qui n'ont pas encore de classe, ainsi qu’à l'extension des toilettes (rajoutant une autre aux deux existantes). Nous comptons sur vous. Merci d'avance. »

Nous profiterons du séjour pour nous rapprocher d’une association locale de quartier dénommée « La Voie », dont les objectifs sont de renforcer la solidarité d’entente, la concertation et l’esprit civique au sein des populations ; contribuer à la promotion de toute activité liée au développement économique et social ; participer à l’assainissement et à la protection de l’environnement. Ces échanges s'avèreront fructueux.

2 - LE MONTAGE DU PROJET

Une fois le groupe constitué et le projet bien identifié, la question majeure restait celle du financement. Pour cela, il a été décidé que la plus grosse partie du budget serait le fruit d'un auto financement, basé essentiellement sur l'organisation de manifestations culturelles et plus particulièrement de concerts. A cela se sont ajoutés les nombreuses ventes de gâteaux et d'artisanat sur les marchés de Reillanne, Manosque et Apt, l'organisation d'une tombola en décembre 2007, ainsi que des démarches pour la recherche de sponsors et de subventions.
De juin 2006 à février 2007, les jeunes ont consacré leur temps libre à ces actions et se réunissaient au rythme d'une fois par semaine environ. En 8 mois, plus de 13000 euros ont ainsi été réunis, dont 60 % en autofinancement, 20 % en subventions et dons, et 20 % en apports personnels, chaque participant mettant la main à son porte-monnaie.
Outre l'aspect financier, cette implication a permi au groupe de se souder, à chacun de trouver sa place en son sein, de s'approprier le projet et de renforcer les motivations déjà fortes, même si des moments de doute ont alors traversé les esprits... Le jour du départ, chacun savait pourquoi il était là !
Marché de Manosque - Nov. 2006
« La préparation a permis au groupe d’avoir un premier contact et en même temps de tester la motivation de chacun pour savoir jusqu’où nous étions prêts à nous investir dans le projet. De plus, ces différentes manifestations nous ont permis de gagner l’argent nécessaire au voyage. Les organiser fut une expérience très enrichissante. Pour les marchés par exemple, nous étions obligés d’aller vers les autres, de vaincre notre timidité afin de faire connaître notre projet.» Célia


Panier garni de la tombola - Déc. 2006
« Je crois qu’il était très important pour nous de créer ce voyage de toute pièce. Nous avons tous adoré organiser les concerts. J’étais très fière. Ma mère et Helmut se sont aussi beaucoup investis, et ça m’a fait énormément plaisir, d’autant que toute ma famille ne me soutenait pas. Je crois qu’il était important de saisir tout ce que ce voyage représenterait pour nous. Je ne suis pas sûre que nous avions bien compris lorsqu’il fallait faire les marchés mais si c’était à refaire, c’est sans hésiter ! » Léa

Ablaye Cissokho à Reillanne - 24 juillet 2006

Cabaret tzigane à Saint Michel l'Observatoire - 20 octobre 2006

Natty de Sinsemilia et Canapacoustik à Forcalquier - 17 février 2007

« La préparation en amont a été aussi importante que le voyage en lui-même, ne serait-ce que pour la relation entre les jeunes qui s’est très bien engagée et le fait que chacun ait trouvé sa place au sein du groupe. » Valentin

3 - EN ROUTE POUR TAMBA

25 Février 2007

Tambacounda est située à l’Est de la Gambie, à l’intérieur des terres sénégalaises, à plus de 500 kilomètres de Dakar. La ville est étendue et aérée. Elle compte environ 80000 habitants. Les températures y sont très élevées à partir du mois de mars. A la différence des bourgs plus touristiques du bord de mer, «Tamba » est une ville paisible, rythmée par le pas des calèches. Non loin de là, le Parc du Niokolo Koba est une réserve inscrite comme site du Patrimoine mondial et Réserve de la biosphère internationale.
A 120 km de Tamba, vers le Sud Ouest, en Haute Casamance, le village de Thianfara fut l'objet de notre seule sortie, à la moitié du séjour. Ici, loin de la ville, l'Afrique plus vraie que jamais nous accueillit avec beaucoup d'émotion, pour eux comme pour nous.

"C’est encore loin Tamba ? Oui, c’est encore loin. Surtout quand la route est truffée de cratères, qu’il faut une heure pour faire 30 km, et qu’il faut s’arrêter 3 fois pour cause de pannes…Tout le monde est fatigué mais personne ne perd sa bonne humeur : « ça se mérite Tamba… » et enfin, en pleine nuit, après 11 H de route, ça y est, nous y sommes ! " Sylviane
« Je n’étais jamais allée en Afrique et je partais avec une légère appréhension… (et s’ils ne m'aimaient pas… etc.). Tout s’est passé mieux que je n’aurais pu oser l’espérer. » Léa
"Une chose est sûre : ce voyage, ils l’ont attendu et l’enthousiasme est au rendez vous. Excepté pour Célia, c’est leur premier contact avec l’Afrique. Envie de découvertes, de rencontres ; un projet ; nos 7 jeunes savent pourquoi ils sont là et dans leurs bagages, y’a une bonne dose de motivation !
Le chantier est essentiel, mais pour moi, c’est ce qu’ils vont, ensemble, découvrir sur eux-mêmes, sur les autres et sur une autre culture qui me préoccupent. La rencontre avec l’Afrique ne laisse jamais indifférent, c’est de cette rencontre et de ce qu’elle va provoquer dont je me sens, en partie, responsable.
" Sylviane

4 - L'ECOLE MATERNELLE - NOTRE ARRIVEE

A notre arrivée, une grande réception était organisée : accueil chaleureux, musique, rafraîchissements... enfants, enseignants et parents étaient tous réunis dans la cour.


L'école maternelle de Tamba et son directeur Tidiane Baldé











« Les enfants étaient tous réunis dans la cour et criaient « adja, adja !! le sourire m’est monté jusqu’aux oreilles et je me suis senti très heureux. » Valentin
"Construire une salle de classe était nécessaire, voire urgent. Ils sont parfois jusqu'à 80 entassés dans une classe. Dans ma classe, nous sommes 37 et c'est presque impossible de travailler. Alors imaginez à 80 !" Léa
« Pour dire bonjour par exemple, la coutume est de serrer la main, tout le monde nous disait bonjour, même les enfants âgés de même pas 4 ans! ». Célia

5 - LE CHANTIER

Le projet consistait en la création d'une nouvelle salle de classe maternelle. Son implantation a été décidée sur l'emplacement d'un ancien préau qui menaçait de s'effondrer, profitant de la dalle existante. Il était demandé de recouvrir celle-ci d'une toiture soutenue par des piliers de briques et de l'entourer d'un muret d'une hauteur de 50 à 70 cm. Ce chantier fut le fruit d'un travail collectif entre jeunes français et jeunes sénégalais. Au fil des jours se sont tissés de véritables liens d'amitiés qui perdurent aujourd'hui.
ETAPE PAR ETAPE

Les fondations - nettoyage

Les fondations - creusement
« Pour réussir ce pari assez fou de construire cette salle de classe en 12 jours, il nous a fallu travailler toute la journée, donc de 7 h à 13 h et de 16 h à 19 h. Notre organisation a été bousculée mais l’envie du groupe de réussir ce projet a devancé les problèmes du chantier. Cet effort m’a paru très impressionnant, je tiens à le souligner, car tout n’était pas facile, mais en travaillant en groupe, en ayant des discussions constructives et sans malentendu, nous avons décidé ensemble de nous consacrer en priorité au chantier. » Mathias
Les fondations - creusement
« Les Africains étaient très proches de nous, ils aimaient nous toucher les cheveux (surtout les filles, car il faut dire qu’ils ne sont pas du tout pareil et que cela les impressionnait !), nous tenir, nous parler… » Laetitia
Les fondations - le creusement
« Au niveau du chantier, sans parler du Sénégal, j’ai beaucoup appris, nous avons amené là-bas les seules choses intéressantes que nous pouvions apporter : notre tête et nos mains. Le fait d’apporter, non seulement du matériel mais aussi de l’aide physique et mentale, apporter des techniques, des connaissances, tout en exerçant et en pratiquant avec eux, cela ma paru être une approche différente de l’humanitaire, moins en rapport avec les différences de société mais plus en rapport avec les différences de culture. Au départ, c’est pour cela que j’ai accepté de participer à ce projet, et finalement, cette façon d’intervenir m’a paru appropriée aux demandes locales ». Mathias

Les fondations - le ferraillage






















Les fondations - le coulage du béton
Les briques - le malaxage
"Au début, les garçons sénégalais avaient du mal à nous laisser travailler, ils voulaient constamment nous aider et faire notre « tâche », mais à force de leur répéter qu’on voulait et qu’on pouvait le faire, ils l’ont accepté. » Laetitia
Les briques - le tamisage

Les briques - le compressage
« Le chantier fut un lieu d’échange et un bon moyen pour s’insérer dans le milieu africain» Nils

Les briques - le séchage
« Nos activités sur le chantier étaient reconnues dans le quartier et nous avons vite été considérés et regardés d’une autre façon qu’à notre arrivée, ce qui nous a permis de rentrer dans leur quotidien et c’est là, quand nos relations se sont éclaircies, quand les idées reçues ont disparu, quand nous avons été acceptés tels que nous sommes (et cela a été rapide) que nous avons pu amorcer ces échanges de vérités. Nos discussions étaient nombreuses et j’ai découvert de nouveaux points de vue sur le monde, sur la vie, sur l’humain.» Mathias

6 - LE CHANTIER (suite)

"Peu à peu, les travaux avancent ; malgré les aléas. Ca a de la « gueule », un mur en briques de terre, de la couleur et une texture ; on a envie de toucher, doucement". Sylviane

"Il y aura bien sûr, les attentes de livraisons de matériaux, les jeunes Sénégalais qui doivent venir travailler avec le groupe et qui n’arrivent toujours pas, les problèmes de transport pour aller sur le chantier (à quelques kilomètres de notre lieu d’hébergement), Didier s’active dans tous les sens, et le temps défile, défile... La chaleur devient de jour en jour plus écrasante, surprise : pas de moustique ! " Sylviane

"Sur le chantier, il faut apprendre à gérer ses efforts, apprendre des gestes techniques, actionner la presse à briques à la force des bras, manier la pelle, oublier qu’on est fatigué, qu’il fait vraiment chaud et que la poussière colle à la peau. « ici, j’ai même pas envie de me maquiller, finalement, c’est pas important » me dit Léa. Oui, ici, il y a d’autres priorités. Et tous l’ont vite compris, ils le diront, chacun avec ses mots : ici, l’essentiel n’est pas dans l’apparence." Sylviane

"En les voyant revenir du chantier, je devinais si la matinée avait été bonne ou non : les visages exprimaient la satisfaction, le mécontentement ou la crainte de ne pas atteindre l’objectif. Malgré toutes ces difficultés, je n’ai jamais perçu le moindre signe d’abandon, la motivation de chacun d’entre eux était réelle et la volonté d’aboutir a, je crois, maintenu le groupe dans une dynamique positive. Tout en gardant leur personnalité respective ; chacun a fait abstraction de soi pour soutenir le projet et la qualité de l’ambiance : aucune parole agressive ou désobligeante n’a été prononcée. Mesdemoiselles, Messieurs, chapeaux bas ! j’en ai connu d’autres qui ont craqué pour moins que ça ; d’autant plus que la deuxième semaine, vous avez accepté de retourner sur le chantier en fin d’après midi …" Sylviane

« Après toutes les difficultés endurées, on a enfin fait ce que nous préparions depuis des mois, pour les petits de l'école maternelle. » Guilhem
« Chaque seconde était une leçon de vie. Là-bas, j’ai découvert un autre monde, une nouvelle façon de vivre, de pensée, de fonctionner.» Mathias
« Ce genre de voyage est un outil pédagogique fort. En 15 jours, j’ai appris plus qu’en un bon bout de temps au lycée. Ce voyage était un choc, et il m’a permis de me retrouver tel que je suis vraiment. » Mathias


Aujourd'hui, la qualité de la construction a suscité l'envie de poursuivre l'édification des murs jusqu'à la toiture. Ceci fera l'objet d'une deuxième tranche de travaux, probablement en novembre 2007, et qui sera financée par l'association ADJA, Didier devant se rendre au Sénégal à cette époque.

7 - LE CHANTIER / les sanitaires

L'autre partie du chantier consistait en l'extension des sanitaires. Un local vide jouxtant les sanitaires existants accueillit une troisième latrine.

« Notre intervention a été utile dans le sens où cela a créé un lien entre deux cultures différentes, deux modes de vie… Dans le quartier nous avons rencontré de nombreux jeunes de notre âge et c’était intéressant de comparer nos façons de penser. A l’école nous avons construit un sanitaire et la salle de classe, rien que pour cela notre passage n’a pas été inutile. » Laetitia

« Je fais super attention à l’eau maintenant (même si je le faisais avant) car là-bas, on a vu ce que c’était de ne pas avoir de l’eau ou à boire quand on le souhaite, au robinet… » Laetitia

«Je pensais qu’on aurait l’eau courante, en fait je ne m’étais même pas posé la question mais finalement j’ai trouvé que se doucher avec seulement un seau est plus économique et cela ne nous empêche pas d’être propre. (…) Nous sommes habitués à des choses qui semblent naturelles et faciles à obtenir mais qui ne le sont pas tels que l’eau et l’électricité.» Célia

8 - AU SEIN DE L'ECOLE

Une partie de l'équipe enseignante sénégalaise

«A l’école, dès qu’un enfant pleurait, j’allais le prendre dans mes bras. Célia faisait pareil. Ils étaient tout intimidés, mais arrêtaient de pleurer illico. Après, les enfants venaient tous à proximité et pleuraient tous (ce qui a fait dire à Valentin que je faisais pleurer les enfants) pour qu'on les consolent. » Léa
"Dans une école, il y a des… enfants ; ils s’accrochent en grappes aux mains des filles, ravies : « comment on dit en wolof : tu t’appelles comment ? ». Elles les promènent dans la cour de récréation, elles jouent, elles consolent, elles ont dans les yeux une petite lueur : « t’as vu comme ils sont beaux !? »
Sylviane
« Se sentir utile même si c’était petit ce que nous avons fait, c’est déjà important, et rencontrer une autre culture, il n’y a rien de plus enrichissant » Laetitia
La remise des 11 paquets à l'école, contenant des jouets, des vêtements, du matériel scolaire (feutres, peintures, papiers...), des livres.


La réception du chantier